07/06/2022 09:00Faux médicaments : un enjeu majeur de santé publique

faux médicaments

Le 30 mai dernier, les douanes sénégalaises ont indiqué avoir saisi des centaines de cartons de faux médicaments, d'une valeur estimée à 1,7 million d'euros. Antiviraux, médicaments de Phytothérapie, traitements antipaludiques, mais aussi avec la Covid, masques, kits de dépistage du coronavirus, gants et respirateurs), tout est falsifiable. Ce fléau ne connait pas de frontière. L’Organisation Mondiale de la Santé estime qu’un médicament sur dix est falsifié dans le monde et que ce chiffre se monte à un sur quatre dans les pays en voie de développement. Comme le souligne le laboratoire SANOFI, le trafic de faux médicaments est une activité encore très peu punie, qui génère des profits considérables pour les organisations criminelles nationales et internationales impliquées. Ce juteux marché atteint selon différentes sources, les 200 milliards de dollars au niveau mondial et concurrence largement le trafic de drogue avec ses 250 milliards.

Le traçage obligatoire des médicaments, un investissement pour les pharmacies…

Dans le cadre de la lutte contre la falsification et la contrefaçon, les médicaments doivent, depuis 2019, être équipés d’un dispositif de traçabilité matérialisé par un numéro de série unique par boîte aux niveaux national et européen. Un système antieffraction positionné sur chaque boite permet de garantir son authenticité et son intégrité. Seuls les médicaments à prescription médicale obligatoire et l’Oméprazole conseil devront disposer d’un identifiant unique. Avec un contrôle en back office doublé d’un autre au comptoir, au moment de leur délivrance, les médicaments sont ainsi tracés sur toute la chaine de distribution.

Les pharmaciens s’étaient engagés à intégrer le dispositif de sérialisation avant la fin de l’année 2021, sous peine de sanctions européennes. Début janvier 2022, environ 5 000 officines sur près de 22 000 étaient connectées au répertoire national de vérification des médicaments (NMVS : National Medicines Verification System), et à peu près 12 000 officines avaient suivi la procédure pour récupérer le certificat et l’installation pour sérialiser. Le déploiement opérationnel de la sérialisation en France prend ainsi plus de temps que prévu, indique la plateforme logicielle Blueway sur son site.

…comme pour l’hôpital, au bénéfice de tous

Il en est de même pour les pharmacies à usage interne (PUI) de 700 établissements de santé au moins, soit 1/3 des 2 500 sites hospitaliers français, qui ne se sont toujours pas organisées précise dans une récente étude la Mutuelle Nationale des Hospitaliers. Cette dernière cite le CHU de Clermont-Ferrand qui est l’un des premiers à s’être mis à la sérialisation, dès 2019. Même si scanner chaque boîte avant de la ranger prend au moins deux fois plus de temps qu’avant, admet la pharmacienne responsable des approvisionnements en médicaments de l’hôpital, sans compter le coût dans l’investissement du matériel et celui lié à un emploi supplémentaire dans le service, celle-ci met en avant, au-delà du souci d’être en conformité avec la loi, le réel enjeu de santé publique. A cela s’ajoute une plus-value en matière de gestion des stocks. En conclusion, en ville comme à l’hôpital, il y a un risque à ne pas rentrer dans le processus de sérialisation, dans un monde où les risques croissants de pandémie dus aux changements climatiques pourraient bien ouvrir de nouveaux débouchés aux falsificateurs de médicaments. D’autant que les réseaux criminels sont imaginatifs, comme le souligne Interpol sur les faux médicaments Covid 19. « La distribution de ces produits peut s’effectuer au moyen de plateformes de commerce électronique et de réseaux sociaux, de pharmacies peu scrupuleuses, d’applications de messagerie et du dark Web ainsi qu’au travers de la prescription en utilisant des documents eux-mêmes falsifiés ». Le monde du faux n’a pas de limite, c’est pourquoi nous devons le combattre partout, résolument et dans la durée.